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Glyphosate, l’impossible débat (note de lecture n°2)

Publié en ligne le 29 mars 2020
Glyphosate, l’impossible débat
Intox, mensonges et billets verts

Gil Rivière-Wekstein
Le Publieur, 2020, 172 pages, 18 €

Journaliste au parcours très européen (né en Belgique, scolarisé au Danemark avant de s’installer en France) et spécialiste des questions agricoles et environnementales, Gil Rivière-Wekstein anime un blog d’analyses de l’actualité agricole qui publie une lettre d’information mensuelle française intitulée « Agriculture & Environnement » en s’appuyant sur l’examen scientifique des faits. Pourfendant les campagnes de désinformation sur des sujets sensibles, il a publié plusieurs ouvrages dénonçant les idées reçues : Abeilles, l’imposture écologique (2006), Bio : fausses promesse et vrai marketing (2011), Faucheurs de science (2012) ainsi que Panique dans l’assiette (2017).

Aujourd’hui, il aborde la question du glyphosate qui est devenu l’objet d’une controverse environnementale et sanitaire afin d’en comprendre les raisons. Pourquoi s’est-on attaqué au glyphosate, ce produit désherbant non sélectif, un des plus actifs et des moins toxiques de tous les herbicides qui ont été mis au point au cours des cinquante dernières années ? Cette substance active, qui a satisfait dès les années 1970 à toutes les étapes de l’homologation dans le monde entier, a été évaluée puis réévaluée 1 récemment à la suite de la polémique sur le risque cancérogène par une douzaine d’agences de sécurité sanitaire et alimentaire de presque tous les continents, Europe, Amérique, Asie, Océanie. Pourquoi est-elle l’objet d’un tel dénigrement, non seulement de la part d’organisations militantes lobbyistes bien connues pour certaines de leurs positions anti-technologies (anti-nucléaire, OGM, vaccins, pesticides, etc.), mais aussi de la part de responsables politiques, y compris au plus haut niveau de l’État français ?

Pour répondre à ces questions, G. Rivière-Wekstein s’est attaché à mener une enquête approfondie en décortiquant l’enchaînement des faits qui s’enchevêtrent dans des strates différentes mêlant le fonctionnement des cabinets d’avocats américains, les conflits d’intérêts de certains protagonistes, la désinformation que pratiquent des militants très introduits dans les milieux médiatiques. En exposer les tenants et les aboutissants clairement, afin que le lecteur s’y retrouve, était un véritable défi. C’est ce qu’a fait G. Rivière-Wekstein qui produit là un livre grand public qui se lit comme un roman policier.

Cet ouvrage dévoile les ressorts d’une habile manipulation opérée au sein d’une agence mondiale d’évaluation des risques, le Centre international de recherche sur le cancer de l’Organisation mondiale de la santé, dont une des décisions, controversée, est à l’origine de l’affaire. Il nous plonge également dans les arcanes de la communication et dénonce les manœuvres qui ont été employées pour mieux tromper l’opinion publique.

Ce livre, vous l’avez compris, n’est pas un ouvrage d’agronomie consacré au désherbage des plantes cultivées mais vise à éclairer le débat en nourrissant la réflexion à partir d’« éléments nouveaux encore ignorés du grand public », comme le souligne Jean-Daniel Flaysakier dans la préface. Ce médecin cancérologue et titulaire d’un Master of Science de l’université Harvard à Boston (États-Unis) a été pendant très longtemps rédacteur en chef adjoint sur la chaîne publique de télévision France 2. Dans sa chronique quotidienne sur la santé dans l’émission « Télématin », J.-D. Flaysakier apportait le point de vue de la science et du bon sens en « déminant » des sujets liés à de fausses rumeurs ou à des idées reçues. Un « déminage », c’est aussi ce que le livre de G. Rivière-Wekstein s’attache à faire. C’est pourquoi je ne peux que recommander sa lecture, qui devrait captiver le lecteur et lui donner des clefs en soulevant un coin du voile. En refermant le livre, on aimerait tant que cette histoire ne soit que de la fiction !

1 Voir « Le glyphosate est-il cancérogène ? » SPS n°323