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L’évaluation des risques pour la santé humaine et celle des sols

Publié en ligne le 2 mai 2024 - Environnement et biodiversité -

Pour agir de façon rationnelle face à une contamination avérée ou suspectée d’un sol, il est en premier lieu nécessaire d’évaluer les risques toxicologiques (pour la santé humaine) et écotoxicologiques (pour la santé du sol). La communauté scientifique a élaboré une démarche d’évaluation des risques, dont les principes ont d’ailleurs été retenus par l’Union européenne dans sa très récente proposition de directive sur la surveillance et la résilience des sols (la Soil Monitoring Law) [1]. Dans cet article, nous parlons des sols en général et précisons quand il est spécifiquement question des sols agricoles.

Les trois dimensions du risque

En matière de contamination du sol, le risque correspond à la probabilité d’apparition et à l’intensité d’un effet toxique affectant les organismes directement ou indirectement exposés [2]. Les organismes vivant dans le sol sont directement exposés à la contamination, alors que les êtres humains y sont le plus souvent indirectement (notamment par la consommation de produits contaminés d’origine végétale ou animale). Quel que soit le type d’exposition, le risque est estimé pour un contaminant donné par la combinaison de trois dimensions :

  1. l’exposition effective des organismes au contaminant,
  2. le danger potentiel de ce contaminant et
  3. la vulnérabilité des organismes exposés, dans leur milieu de vie, à des conditions environnementales et sociales particulières.

L’évaluation d’un risque dépend donc à la fois des caractéristiques du contaminant, des organismes exposés, du sol et du milieu de vie au moment de l’exposition. La notion de risque est parfois abusivement réduite, notamment dans les médias [3, 4], à une seule de ces trois dimensions.

L’exposition

Une question de diversité
L’exposition des organismes vivants se fait dans des contextes très divers selon la nature des contaminants, leurs origines et les voies d’exposition empruntées.

Un inventaire récent a réévalué à plus de 350 000 le nombre de molécules produites et utilisées à travers le monde et donc susceptibles de contaminer l’environnement [5]. Si les deux tiers sont enregistrés avec un numéro CAS (pour Chemical Abstract Service) permettant un accès ouvert à leurs propriétés [6], le devenir dans l’environnement de plus de 120 000 substances chimiques non enregistrées reste mal caractérisé. Cet inventaire reste par ailleurs très certainement incomplet puisqu’aucune information n’a pu être prise en compte pour les substances chimiques produites et utilisées en Amérique du Sud, en Afrique, au Moyen-Orient et dans la plupart des pays d’Asie du Sud-Est du fait de l’absence de réglementation obligeant à réaliser cet inventaire. À titre de comparaison, les pays de l’Union européenne sont soumis depuis 2007 à la réglementation REACH qui impose un enregistrement et une évaluation des risques toxicologiques et éco-toxicologiques pour toutes les substances chimiques (près de 135 000) produites ou importées en son sein [7]. Seules 6 % des substances chimiques inventoriées auraient cependant fait l’objet d’études scientifiques à même d’informer la démarche d’évaluation des risques toxicologiques et écotoxicologiques [8].

Jeune berger près du feu, Paweł Romuald Kowalczewski (1879-1922)

Que l’exposition aux contaminants du sol soit directe ou indirecte, les organismes peuvent être exposés par différentes voies qui dépendent à la fois du contaminant et de l’organisme. Les plantes sont ainsi essentiellement exposées par contact entre leurs racines et le sol. Les animaux et les insectes du sol sont plutôt exposés par ingestion de sol ou d’autres organismes. Enfin, l’être humain est principalement exposé par ingestion de particules de sol (en particulier les jeunes enfants qui absorbent des poussières en mettant les mains à la bouche) ou de produits d’origine végétale ou animale préalablement contaminés par exposition au sol ou par inhalation de particules ou de contaminants du sol particulièrement volatils (par exemple des hydrocarbures) dans les sols fortement contaminés [9].

Particularité de la contamination des sols agricoles
S’agissant des sols agricoles, les sources de contaminants sont également très diverses [10]. La principale est liée à l’activité agricole ellemême, avec notamment les intrants, c’est-à-dire les produits phytopharmaceutiques (également appelés pesticides), les fertilisants minéraux ou organiques et les eaux usées traitées et recyclées pour l’irrigation des cultures. Les plastiques utilisés en agriculture (par exemple sous forme de films pour couvrir le sol) sont également une source importante de contamination lorsqu’ils se désagrègent sous forme de particules microscopiques.

Les activités industrielles et d’extraction minière ainsi que les centres de gestion et d’incinération des déchets sont des sources secondaires de contamination des sols agricoles dont l’intensité est généralement proportionnelle à la proximité des sites d’émission. Les sols servant de support à l’agriculture urbaine ou périurbaine sont particulièrement exposés [9].

Les sols agricoles peuvent aussi présenter une richesse en certaines substances chimiques liée à la nature des roches dont ils sont issus ou à des émissions provenant d’éruptions volcaniques ou de feux de forêts d’origine naturelle. N’étant pas liés aux activités humaines, ces cas d’abondance naturelle ne sont pas considérés comme des contaminations bien qu’ils puissent aussi occasionnellement générer des risques.

Contrairement aux sols des sites industriels, miniers ou urbains qui sont généralement affectés par des contaminations ponctuelles (souvent des concentrations très élevées sur des surfaces réduites avec une source bien identifiée), les sols agricoles sont le plus souvent affectés par des contaminations diffuses [9]. Celles-ci se caractérisent par des sources multiples et donc une grande diversité de contaminants présents en concentration modérée, augmentant lentement dans le temps mais touchant des surfaces très étendues. Une contamination diffuse de sols agricoles se met généralement en place sur des temps longs (plusieurs années, voire décennies) et est donc plus difficile à mettre en évidence.

Intérêts et limites des organismes modèles en écotoxicologie


L’écotoxicologie ambitionne d’évaluer l’effet des contaminants présents dans l’environnement sur l’ensemble des organismes qui y sont exposés, et plus largement sur les perturbations que ces effets peuvent induire sur les processus écologiques à l’œuvre dans les écosystèmes [1]. Il est cependant impossible, en pratique, de mesurer l’ensemble de ces effets et perturbations, du fait de la diversité des organismes et de leurs interactions tout autant que de la multitude des contaminants et de la variété de leurs mécanismes d’action toxique.

Le danger est alors mesuré sur un nombre restreint d’« organismes modèles » censés être représentatifs de la diversité des rôles assurés par tous les organismes présents (incluant les producteurs, les décomposeurs et les prédateurs) dans un compartiment de l’environnement comme le sol [2]. Ces organismes modèles sont sélectionnés pour la maîtrise des connaissances relatives à leur biologie et leur physiologie, leur facilité et leur coût raisonnable d’utilisation dans le cadre de méthodologie normalisée, et enfin leur sensibilité distincte vis-à-vis des différents contaminants auxquels ils sont exposés. Dans la réglementation REACH de l’Union européenne, il est imposé d’estimer le danger avec un minimum de dix valeurs toxicologiques de références obtenues sur des organismes modèles ayant des rôles écologiques différents, comme les plantes cultivées, les micro-organismes (bactéries et champignons), les insectes et les vers de terre [3].

Le nombre et la représentativité écologique des organismes modèles utilisés ne peuvent toutefois garantir une évaluation du danger pour l’ensemble des organismes exposés. Pour tenir compte de cette incertitude, les méthodes d’évaluation des risques intègrent des facteurs de sécurité définis pour chaque contaminant qui permettent de calculer des seuils de danger plus protecteurs pour les écosystèmes.

Références
1 | Lamy I et al., L’Écotoxicologie en questions, Éditions Quae, 2022.
2 | Scheu S, “The soil food web : structure and perspectives”, Eur J Soil Biol, 2002, 38 :11-20.
3 | Oorts K, “Threshold calculator for metals in soil : a global tool for terrestrial risk assessment”, Arche Consulting, mars 2020. Sur arche-consulting.be

Le danger

C’est généralement la dose qui fait le poison
Depuis les écrits de Paracelse au XVIe siècle, les toxicologues cherchent à déterminer la relation entre l’exposition et l’effet, appelée relation « dose-réponse ». On considère ainsi généralement que plus l’exposition d’un organisme à un contaminant est importante, plus l’effet toxique induit le sera lui aussi. La toxicité « aiguë » concerne les effets observés suite à des expositions à de fortes concentrations du contaminant sur de courtes durées (quelques heures à quelques jours). La toxicité « chronique » caractérise au contraire les effets des expositions à de plus faibles concentrations sur des durées plus longues (plusieurs semaines à plusieurs mois). C’est ce deuxième type de mesure de toxicité qui est généralement utilisé dans les démarches d’évaluation des risques [9, 11], notamment dans les cas de contamination diffuse des sols agricoles.

En toxicologie humaine, le danger lié à un contaminant est estimé pour un être humain « moyen » [10]. En écotoxicologie, il est caractérisé pour un ensemble de groupes d’organismes modèles censés être représentatifs de la biodiversité du milieu (voir encadré ci-dessus) [12]. Le seuil en dessous duquel le danger est considéré comme faible correspond alors à la concentration du contaminant dans le corps en toxicologie humaine ou dans le sol en écotoxicologie pour laquelle un certain pourcentage (généralement 50 à 95 % suivant les méthodes) des individus ou des organismes modèles exposés ne sont pas affectés.

Des exceptions notables
Le principe d’une relation dose-réponse positive et monotone (qui évolue toujours dans le même sens) connaît des exceptions. Bien que parfois débattues dans la communauté scientifique [13, 14], et contrairement à ce qui a pu être dit dans certains médias [15], elles ne remettent pas fondamentalement en cause le principe de base, valide dans la majorité des cas, selon lequel « c’est la dose qui fait le poison ». Elles soulignent en revanche la complexité des réponses des organismes lorsqu’ils sont exposés à une diversité de contaminants.

L’exception la plus fréquemment observée expérimentalement est le phénomène d’hormèse où l’exposition à une faible dose d’un contaminant entraîne une stimulation de l’organisme (par exemple une augmentation de la croissance) avant de retrouver une réponse monotone et positive entre l’exposition et l’effet toxique à plus forte dose [16]. Pour les éléments et molécules indispensables à la croissance des organismes (appelés nutriments), l’hormèse est même un phénomène essentiel.

Dans les sols agricoles, c’est typiquement le cas du cuivre et du zinc qui sont des oligo-éléments 1 dont l’apport intentionnel sous forme de fertilisant peut stimuler la croissance des cultures dans les sols naturellement les plus pauvres, alors qu’ils peuvent devenir toxiques pour ces mêmes cultures lorsque le niveau de contamination en ces éléments devient trop important [17]. À l’exception des nutriments, ce phénomène reste à l’heure actuelle peu voire pas pris en compte dans les démarches d’évaluation des risques de contamination des sols.

L’exception la plus médiatisée est sans aucun doute celle concernant les contaminants pouvant avoir un effet sur le système qui régule les activités hormonales des organismes vivants, appelés perturbateurs endocriniens, et que l’on peut retrouver dans les sols, comme le bisphénol A, les nonylphénols ou les polybromodiphényléthers [18]. Certaines des molécules de ce groupe peuvent induire un effet toxique dans une gamme de concentrations très faibles, bien inférieures à la plus faible concentration considérée comme pouvant avoir un effet toxique significatif dans les démarches classiques d’évaluation des risques [19]. D’abord âprement discutée dans la communauté scientifique dans les années 2010 [13, 20], cette réponse toxique singulière est aujourd’hui avérée chez l’être humain et largement mise en évidence en écotoxicologie, bien que les mécanismes ne soient pas toujours clairement établis [19]. Elle nécessite en conséquence une prise en compte spécifique dans les procédures réglementaires [21, 22], sans pour autant remettre en question la démarche classique d’évaluation qui reste valable pour la majorité des contaminants ne présentant pas ce type de réponse.

Le mélange de contaminants doit également être évoqué puisqu’il s’agit du contexte de contamination presque systématiquement observé dans l’environnement et les sols [9, 23]. Ces mélanges de contaminants sont suspectés de présenter un effet toxique pour les écosystèmes supérieur à la somme des effets individuels, appelé « effet cocktail ». Cependant, la communauté scientifique s’accorde actuellement pour dire qu’un tel effet cocktail serait rare en toxicologie humaine et en écotoxicologie et concernerait essentiellement les expositions aux fortes doses de contaminants [24], qui restent donc peu fréquentes dans les sols agricoles. En conséquence, l’effet toxique d’un mélange de contaminants est classiquement estimé à travers la somme des effets individuels [25]. L’utilisation des méthodes développées par la communauté scientifique pour évaluer le risque lié aux mélanges de contaminants est cependant encore rarement imposée dans les réglementations visant à protéger la santé humaine et de l’environnement [26]. Il s’agit d’un axe majeur d’amélioration des réglementations dans les prochaines années.

La vulnérabilité

Pour un niveau d’exposition donné et relativement au danger moyen estimé en laboratoire sur des organismes modèles, l’effet toxique peut s’avérer être plus important chez certains
organismes confrontés à des facteurs environnementaux (climatique ou nutritionnel par exemple) défavorables [2, 27]. Il a par exemple été montré que des céréales cultivées dans des régions anciennement viticoles et contaminées en cuivre par l’apport de produits phytopharmaceutiques présentaient généralement des symptômes de toxicité plus marqués lorsque les sols étaient calcaires. Dans ce type de sols, les céréales doivent en effet lutter contre une déficience nutritionnelle en fer qui exacerbe la toxicité induite par le cuivre [17].

Le Laboratoire municipal (préfecture de police) (détail), Ferdinand Gueldry (1858-1945)

Deux grandes approches pour mettre en œuvre l’évaluation des risques

Les trois dimensions de l’évaluation des risques présentées ci-dessus sont combinées dans le cadre de différentes méthodes d’évaluation environnementale, dont certaines sont mobilisées dans les réglementations comme REACH [26]. Ces méthodes peuvent être prospectives, c’està-dire destinées à évaluer les risques avant que la contamination n’ait lieu ou, au contraire, rétrospectives. Elles peuvent être entièrement fondées sur des outils de modélisation ou au contraire en tout ou partie sur des mesures expérimentales généralement réalisées à partir de protocoles normalisés [10, 28].

Quelles que soient leurs spécificités, ces différentes méthodes suivent deux grands types d’approche d’évaluation environnementale : l’analyse des risques et l’analyse du cycle de vie. La première est généralement plus approfondie en tenant plus précisément compte des mécanismes physico-chimiques et biologiques déterminant la toxicité humaine et l’écotoxicité d’un contaminant, mais elle est en revanche moins exhaustive sur le nombre de contaminants évalués (voir [29] pour un exemple). Prenant en compte l’inventaire des flux de matière et d’énergie associés aux activités humaines depuis l’extraction des matières premières jusqu’à l’élimination finale des produits en incluant leur transport [30, 31], l’analyse du cycle de vie offre une perspective plus globale car elle évalue une quinzaine d’impacts environnementaux (dont la toxicité humaine et l’écotoxicité) pour tous les compartiments de l’environnement, tout en considérant conjointement plusieurs milliers de contaminants (voir [32] pour des exemples appliqués aux sols agricoles). En revanche, cette analyse est une méthode à visée uniquement comparative, par exemple sur l’impact de deux modes de production agricole (biologique et conventionnelle).

Conclusion

L’évaluation des risques toxicologiques et écotoxicologiques est une démarche scientifique robuste, construite patiemment depuis plusieurs siècles au croisement de nombreuses disciplines (physiologie, écologie, toxicologie, épidémiologie, chimie de l’environnement). Elle est essentielle pour intégrer la préservation de la santé humaine et de l’environnement dans l’analyse bénéfices-risques des activités humaines et ainsi éclairer la prise de décision quant à leur réglementation (voir l’encadré en fin d’article).

Les Chimistes, Ernst Zimmermann (1852-1901)

Malgré sa complexité apparente, cette démarche d’évaluation reste pourtant encore très insatisfaisante dans sa capacité à informer sur les risques pour la santé humaine et celle de l’environnement, en particulier dans les contextes de contamination des sols agricoles. La plupart des évaluations donnent aujourd’hui encore des réponses essentiellement en termes d’effets (comme le pourcentage d’organismes affectés par la présence d’un contaminant) plutôt qu’en termes d’impacts effectifs sur la santé humaine (par exemple en nombre de jours de vie en bonne santé perdus) et celles des sols (par exemple en perte de rendements des cultures). Ce constat est vraisemblablement à attribuer à l’état encore fragmentaire des connaissances ainsi qu’à leur traduction incomplète dans les méthodes d’évaluation [33]. Approfondir nos connaissances afin d’améliorer notre capacité à évaluer les risques liés à la contamination des sols agricoles est donc un enjeu de société majeur, notamment dans la perspective de faire évoluer les réglementations environnementales et sanitaires.

Références


1 | European Commission, “Proposal for a directive of the European Parliament and of the Council on Soil Monitoring and Resilience”, 2023. Sur environment.ec.europa.eu
2 | Lamy I et al., L’Écotoxicologie en questions, Éditions Quae, 2022.
3 | Mandard S, « Le cadmium, ce “tueur” caché dans les engrais », Le Monde, 17 mars 2018. Sur lemonde.fr
4 | Markowitz G, Rosner D, « Contamination : “Les zones mortes, prélude d’une planète sans vie” », Tribune, Le Monde, 2 septembre 2018. Sur lemonde.fr
5 | Wang Z et al., “Toward a global understanding of chemical pollution : a first comprehensive analysis of national and regional chemical inventories”, Environ Sci Technol, 2020, 54 :2575-84.
6 | American Chemical Society, “CAS data”, CAS content collections (consulté le 6 décembre 2023). Sur cas.org
7 | European Chemicals Agency, « Comprendre REACH » (consulté le 25 novembre 2023). Sur echa.europa.eu
8 | Muir DCG et al., “How many chemicals in commerce have been analyzed in environmental media ? A 50-year bibliometric analysis”, Environ Sci Technol, 2023, 57 :9119-29.
9 | Fantke P et al., “Exposure and toxicity characterization of chemical emissions and chemicals in products : global recommendations and implementation in USEtox”, The International Journal of Life Cycle Assessment, 2021, 26 :899-915.
10 | Food and Agriculture Organization, “Global assessment of soil pollution”, Report, 2021. Sur fao.org
11 | Fantke, P et al., “Toward harmonizing ecotoxicity characterization in life cycle impact assessment”, Environ Toxicol Chem, 2018, 37 :2955-71.
12 | Oorts K, “Threshold calculator for metals in soil : a global tool for terrestrial risk assessment”, Arche Consulting, mars 2020. Sur arche-consulting.be
13 | Rhomberg LR, Goodman JE, “Low-dose effects and nonmonotonic dose-responses of endocrine disrupting chemicals : has the case been made ?”, Regulatory Toxicology and Pharmacology, 2012, 64 :130-3.
14 | Ames BN, Gold LS, “Paracelsus to parascience : the environmental cancer distraction”, Mutation Research, 2000, 447 :3-13.
15 | Foucart S, « La seconde mort de l’alchimiste Paracelse », Le Monde, 11 avril, 2013. Sur lemonde.fr
16 | Calabrese EJ, “Paradigm lost, paradigm found : the re-emergence of hormesis as a fundamental dose response model in the toxicological sciences”, Environ Pollut, 2005, 38 :378-411.
17 | Michaud AM et al., “Copper uptake and phytotoxicity as assessed in situ for durum wheat (Triticum turgidum durum L.) cultivated in Cu-contaminated, former vineyard soils”, Plant Soil, 2007, 298 :99-111.
18 | Kwak JI et al., “Soil ecotoxicity of seven endocrine-disrupting chemicals : a review”, European Journal of Soil Science, 2017, 68 :621-49
19 | Vandenberg LN et al., “Hormones and endocrine-disrupting chemicals : low-dose effects and nonmonotonic dose responses”, Endocrine Reviews, 2012, 33 :378-455.
20 | Beausoleil C et al., “Low dose effects and non-monotonic dose responses for endocrine active chemicals : Science to practice workshop. Workshop summary”, Chemosphere, 2013, 93 :847-56.
21 | More S et al., “Opinion on the impact of non-monotonic dose responses on EFSA’s human health risk assessments”, EFSA Journal, 2021, 19 :6877.
22 | Crane M et al., “Commentary : assessing the endocrine disrupting effects of chemicals on invertebrates in the European Union”, Environmental Sciences Europe, 2022, 34 :36.
23 | Escher BI et al., “Tracking complex mixtures of chemicals in our changing environment”, Science, 2020, 367 :388-92.
24 | Cedergreen N, “Quantifying synergy : a systematic review of mixture toxicity studies within environmental toxicology”, PLoS One, 2014, 9 :e96580.
25 | Backhaus T, Faust M, “Predictive environmental risk assessment of chemical mixtures : a conceptual framework”, Environ Sci Technol, 2012, 46, 2564-73.
26 | Kienzler A et al., “Regulatory assessment of chemical mixtures : requirements, current approaches and future perspectives”, Regulatory Toxicology and Pharmacology, 2016, 80 :321-34.
27 | Adger WN, “Vulnerability”, Global Environmental Change, 2006, 16 :268-81.
28 | Organisation internationale de normalisation, « Qualité du sol : lignes directrices relatives aux choix et à l’évaluation des essais appliqués à la caractérisation écotoxicologique des sols et des matériaux de type sol », ISO 17616, 2019. Sur iso.org
29 | Ineris, « Le logiciel Modul’ERS » (consulté le 25 novembre 2023). Sur ineris.fr
30 | Organisation internationale de normalisation, « Management environnemental. Analyse du cycle de vie : principes et cadre », ISO 14040, 2006. Sur iso.org
31 | Organisation internationale de normalisation, « Management environnemental. Analyse du cycle de vie : exigences et lignes directrices », ISO 14044, 2006. Sur iso.org
32 | Avadí A et al., “Chapter two – Trace contaminants in the environmental assessment of organic waste recycling in agriculture : gaps between methods and knowledge”, Adv Agron, 2022, 174 :53-188.
33 | Persson L et al., “Outside the safe operating space of the planetary boundary for novel entities”, Environmental Science & Technology, 2022, 56 :1510-21.

Analyse bénéfices-risques du recyclage agricole des matières fertilisantes d’origine résiduaire (Mafor)


Le recyclage et la valorisation de nos déchets est aujourd’hui une préoccupation centrale des politiques publiques en matière d’économie circulaire [1]. Un levier essentiel pour y parvenir est de favoriser la valorisation en agriculture des matières fertilisantes d’origine résiduaire (Mafor) qui sont aujourd’hui épandues sur près de 30 % de la surface agricole française [2]. Cette pratique consiste à épandre les sous-produits des activités agricoles (effluents d’élevage), urbaines (boues de station d’épuration, biodéchets) et industrielles (effluents issus de l’agro-alimentaire) sur les sols agricoles en substitution totale ou partielle des fertilisants (engrais et amendements) de synthèse ou issus de ressources non renouvelables. Mais les Mafor contiennent aussi une diversité importante de contaminants chimiques et biologiques qui se retrouvent dans les sols agricoles après épandage et dont l’innocuité pour la santé humaine et celle de l’environnement doit être assurée. Les choix de société en matière de valorisation agricole des Mafor doivent donc reposer sur une évaluation des bénéfices et des risques de cette pratique. C’est dans cet esprit que l’Inra, le CNRS et l’Irstea ont coordonné entre 2012 et 2014 une expertise scientifique collective sur le sujet [3].

En ce qui concerne l’analyse des risques, l’expertise a notamment souligné que les éléments traces (parfois improprement appelés « métaux lourds »), souvent les principaux contaminants chimiques apportés par les Mafor, s’accumulent faiblement mais irrémédiablement dans les sols agricoles et peuvent s’accumuler de façon non négligeable dans les cultures. Pour ce qui est des contaminants organiques, la diversité de leur nature chimique et donc de leur comportement dans les sols rend difficile une évaluation exhaustive des risques. Il semble cependant qu’il y ait un risque important de transfert, des sols vers les animaux d’élevage, de certains contaminants organiques particulièrement persistants et lipophiles comme les polychlorobiphényles (PCB), avec un risque d’accumulation dans les tissus graisseux comme le lait et les œufs. Les Mafor sont également source d’apports de microorganismes pathogènes qui, couplés à la présence de résidus d’antibiotiques et d’éléments traces (cuivre et zinc notamment), semblent susceptibles de favoriser l’apparition et la dissémination dans l’environnement de micro-organismes résistants aux antibiotiques. Ce risque est apparu comme insuffisamment quantifié.

Afin de maximiser les bénéfices tout en minimisant les risques, l’expertise a notamment recommandé un meilleur tri des déchets constituants les Mafor d’origine urbaine afin de limiter les sources de contamination, une plus grande maîtrise des pratiques d’épandage (en fréquence et en quantité) sur les parcelles agricoles pour réduire ou ralentir la contamination des sols, une gestion concertée des Mafor à l’échelle des territoires visant à favoriser les échanges entre zones urbaines et rurales, et enfin une évolution des réglementations. Les recommandations de l’expertise ont également contribué à la proposition en octobre 2023 d’un socle réglementaire commun à l’ensemble des fertilisants utilisés en agriculture, devant garantir leur efficacité agronomique et leur innocuité sanitaire et environnementale [4].

Références
1 | Agence de la transition écologique, « Économie circulaire : déchets », Ademe, Expertise (consulté le 25 novembre 2023). Sur ademe.fr
2 | Ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, « Le volet agricole de la feuille de route pour l’économie circulaire », 21 septembre 2021. Sur agriculture.gouv.fr
3 | Houot S et al., « Valorisation des matières fertilisantes d’origine résiduaire sur les sols à usage agricole ou forestier », Rapport d’expertise collective, Inra, CNRS, Irstea, 2014. Sur hal.inrae.fr
4 | Ministère de l’Agriculture et de la Souveraineté alimentaire, « Consultation publique : projet de règlementation encadrant l’innocuité et l’efficacité des matières fertilisantes et des supports de culture », 30 octobre 2023. Sur agriculture.gouv.fr

1 Nutriments nécessaires à la croissance et au développement d’un organisme mais à faible concentration

Publié dans le n° 347 de la revue


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Les auteurs

Juliette Faburé

Maîtresse de conférences au sein de l’unité mixte de recherche Ecosys(Inrae et AgroParisTech). Elle est (…)

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Matthieu Bravin

Matthieu Bravin est chercheur au sein de l’unité Recyclage et risque du Centre de coopération internationale en (…)

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Angel Avadí

Chercheur au sein de l’unité Recyclage et risque du Centre de coopération internationale en recherche agronomique (…)

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